La nuit fraîche se fixait, collait ses ombres un peu partout, au moindre recoin, des meubles jusqu'à mon cœur. C'était le moment, repérable, de commencer à nouveau. Je pris la feuille, fine, comme toujours, puis la déposa délicatement sur le bureau. Une terreur froide remonta l'axe de ma colonne vertébrale avec la réaction immédiate, impossible à contrer, de soulever la seule arme que j'avais à disposition contre les ténèbres: mon crayon.
Mes pauvres doigts meurtris d'avance par le travail à venir, qu'ils devaient pourtant fournir, s'agitèrent, s'envolèrent avec anarchie, avant de se déposer, dans une grâce perdue, sur le papier frileux. J'avais, dans la pensée la plus intime, choisi la plus belle image que j'avais conservé de toi. Celle perdue dans ta baignoire, immergée dans l'eau chaude, les montagnes de savon parfumé te cernant tout autour, la chaleur humide de la pièce, la buée prenant l'unique fenêtre. Un spectacle savoureux dont j'ai été le seul témoin.
Tes jolis traits venaient, tes courbes délicieuses aussi. Ta silhouette se formait, me déformait, me réformait. Ton corps nu allongé se dévoilait au bout de mon crayon qui s'était attardé, malgré lui, plus de temps qu'il était nécessaire, sur tes seins. Miner l'indifférence m'était difficile tant ce qui arrivait devant moi n'était que beauté. Je ne cessais de trembloter. Par trois fois, il me fallait arrêter, récupérer un rythme plus ou moins régulier, puis replonger. Je fis apparaitre tes mains que tu avais si petites, voulus les prendre dans les miennes que j'avais si grandes, me rappelai de la difficulté à pouvoir le faire, continuai avec tes fines jambes puis avec tes pieds délicats.
L'étape la plus longue arriva. Les souvenirs remontèrent, troublés d'avoir été dérangés d'aussi profonds, firent jaillir soudain ton visage pâle ovale qui m’exposa en pleine face. Percuté, je m'étais reculé afin de pouvoir te regarder. Le front large, les sourcils fins, le nez busqué, le menton allongé, il ne me fallait rien pour rajouter le rose à tes pommettes discrètes, le rouge à tes lèvres pulpeuses, le châtain à tes cheveux longs ondulés qui recouvraient le tout à moitié. L'évidence l'avait déjà fait.
Mais tu avais beau avoir le vert qu'il fallait à tes yeux en amandes, un coup d'œil me suffit pour comprendre que tu n'étais toujours pas consciente: tu n'avais pas de regard. Ton regard. Alors, mordu par le chagrin, jamais résigné, je te pris, te déchirai en plusieurs morceaux de toi.
- Tu me reviendras, amour, tu me reviendras, te lançai-je dans un souffle en te regardant te disperser dans les airs.
Mes pauvres doigts meurtris d'avance par le travail à venir, qu'ils devaient pourtant fournir, s'agitèrent, s'envolèrent avec anarchie, avant de se déposer, dans une grâce perdue, sur le papier frileux. J'avais, dans la pensée la plus intime, choisi la plus belle image que j'avais conservé de toi. Celle perdue dans ta baignoire, immergée dans l'eau chaude, les montagnes de savon parfumé te cernant tout autour, la chaleur humide de la pièce, la buée prenant l'unique fenêtre. Un spectacle savoureux dont j'ai été le seul témoin.
Tes jolis traits venaient, tes courbes délicieuses aussi. Ta silhouette se formait, me déformait, me réformait. Ton corps nu allongé se dévoilait au bout de mon crayon qui s'était attardé, malgré lui, plus de temps qu'il était nécessaire, sur tes seins. Miner l'indifférence m'était difficile tant ce qui arrivait devant moi n'était que beauté. Je ne cessais de trembloter. Par trois fois, il me fallait arrêter, récupérer un rythme plus ou moins régulier, puis replonger. Je fis apparaitre tes mains que tu avais si petites, voulus les prendre dans les miennes que j'avais si grandes, me rappelai de la difficulté à pouvoir le faire, continuai avec tes fines jambes puis avec tes pieds délicats.
L'étape la plus longue arriva. Les souvenirs remontèrent, troublés d'avoir été dérangés d'aussi profonds, firent jaillir soudain ton visage pâle ovale qui m’exposa en pleine face. Percuté, je m'étais reculé afin de pouvoir te regarder. Le front large, les sourcils fins, le nez busqué, le menton allongé, il ne me fallait rien pour rajouter le rose à tes pommettes discrètes, le rouge à tes lèvres pulpeuses, le châtain à tes cheveux longs ondulés qui recouvraient le tout à moitié. L'évidence l'avait déjà fait.
Mais tu avais beau avoir le vert qu'il fallait à tes yeux en amandes, un coup d'œil me suffit pour comprendre que tu n'étais toujours pas consciente: tu n'avais pas de regard. Ton regard. Alors, mordu par le chagrin, jamais résigné, je te pris, te déchirai en plusieurs morceaux de toi.
- Tu me reviendras, amour, tu me reviendras, te lançai-je dans un souffle en te regardant te disperser dans les airs.